Info : Titan lune de Saturne

Salut

S&V- ROMÁN IKONICOFF a écrit:

Les mers de méthane de Titan, la plus grande Lune de Saturne, sont parmi les lieux les plus intéressants du Système solaire. Car, en dehors de la Terre, Titan est le seul astre à posséder des mers liquides. Il figure ainsi dans le peloton de tête des corps célestes qui pourraient abriter la vie !

La Nasa Innovative Advanced (Niac) a, en effet, conçu le tout premier sous-marin spatial. Le Sub, comme le nomment ses concepteurs, mesure 5,9 m de long, 1,1 m de large et 2 m de haut.

Revêtu de titane, il abrite une structure en aluminium et matériaux composites pour un poids de 446 kg, à vide, et de quelque 1 200 kg quand il est chargé de ses systèmes de communication et de ses instruments scientifiques (spectromètres de masse, sonars, analyseurs chimiques, caméras...).

Pour l'heure, le Sub ne pèse pas un gramme : il n'existe que sous forme de simulation numérique. Toutefois, la phase de proto typage n'est plus si lointaine, puisque le sous-marin en est désormais à la phase II de développement, celle des choix réalistes. Du fait des données récoltées jusqu'en 2017 par la sonde Cassini sur la composition des mers de Titan, certains aspects de son design doivent être affinés.

Car le Sub devrait accomplir un séjour de 90 jours dans Kraken Mare, la plus étendue des trois mers de Titan (400 000 km2), plus grande que la mer Caspienne, avec une profondeur estimée de 160 m.

DE LA VIE DANS LE MÉTHANE ?
L'un des objectifs du projet de la Nasa est de déterminer si une vie peut se développer dans un liquide comme le méthane. Mais cette hypothèse extrême, quoique plausible, ne résume pas tout l'intérêt d'une exploration sous-marine de Titan.

Retracer son histoire climatique, confirmer la présence d'un océan global d'eau liquide à 50 ou 80 km sous la surface, détecter des sources internes de chaleur et tester la possibilité d'une voie mettant en contact les molécules prébiotiques de la surface (mers de méthane incluses) avec cet océan d'eau intérieur sont autant de points que le Sub devrait éclaircir. Mais ce ne sera pas avant 2040 : le projet de Sub est colossal et vise le très long terme.

En phase d'immersion (8 heures par jour), le vaisseau propulsé par 4 hélices devrait progresser à une vitesse de 3,6 km/h, pour parcourir au total 2 000 km. Il analyserait la composition et la densité du liquide en fonction de la profondeur, cartographierait les fonds marins et prélèverait des échantillons de sédiments. En surface (16 heures par jour), il mesurerait les variations de température, de pression, d'humidité et de vitesse des vents, observerait les phénomènes météo et transmettrait ces données à la Terre. Sa consommation moyenne s'élèverait à 800 W, soit 20 kWh par jour (l'équivalent de 8 ampoules de 100 W allumées 24h/24). Pour une mission aussi longue, cela fait beaucoup d'énergie !

UN RISQUE D'ÉBULLITION DU MÉTHANE
C'est l'un des points épineux de la mission, l'alimentation en électricité du sous-marin. Malgré la présence massive de méthane et d'éthane liquides dans les mers de Titan (l'équivalent de notre gaz naturel liquéfié), la solution la plus réaliste serait d'embarquer depuis la Terre une source radio active : deux générateurs de 65 kg qui transforment l'énergie radioactive du plutonium enrichi en électricité et en chaleur.

Cette chaleur permettrait aux instruments scientifiques de fonctionner de manière optimale. Inconvénient : en se dissipant à l'extérieur du sous-marin, elle risquerait de mettre en ébullition un méthane à - 181 °C. D'où l'ajout d'un système de contrôle thermique capable de canaliser et de moduler la chaleur produite par les générateurs (quelque 150 °C) à l'aide d'isolants, d'un réseau de conducteurs thermiques et de systèmes de refroidissement.

Finalement, au prix d'un alourdissement de 95 kg, le sous-marin disposerait d'un système efficace assurant 20 °C à l'intérieur et ne dépassant pas un différentiel de 1,6 °C entre son enveloppe extérieure et la température du méthane liquide dans lequel il est plongé. Une réussite !

TÉLÉGUIDER LE SOUS-MARIN RESTE UN DÉFI
Reste le plus difficile : amener le sous-marin dans la mer et le téléguider. Côté communications, l'idée d'origine était de doter le sous-marin d'une antenne puissante placée sur son dos, comme une arête dorsale, capable de capter les ordres envoyés par la Terre (le programme de la journée) et de transmettre vers la Terre les informations recueillies. Cela évitait de surcharger la mission avec un orbiteur-relais. Mais cette solution obligerait la Terre et le Sub à rester sur une ligne de visée directe, sans que Saturne ne s'interpose. Une conjonction particulière qui réduit drastiquement les fenêtres de lancement possibles de la mission. Aussi, les concepteurs hésitent avec l'alternative de placer un orbiteur comme relais de communication.

Quant au Delivery Scenario, soit l'injection du Sub dans Kraken Mare, les concepteurs avaient initialement pensé embarquer la machine sur le Darpa X-37B, une petite navette sans équipage. Celle-ci serait, en principe, capable de voler dans l'atmosphère de Titan et d'amerrir en douceur. Mais qui amènerait X-37B au voisinage de Saturne ? Finalement, l'équipe semble s'orienter vers une solution plus classique : un système de descente à réaction avec parachutes et amortisseurs gonflables. Mais rien n'est tranché...

Affaire à suivre mais quand ? probablement que je n'en verrais pas la conclusion, vu mon âge..

Article de Science et Vie ici

Salut mon Vieux
Je reviens faire un tour sur le forum, j'ouvre l'onglet physique, et qu'est ce que je vois? Le sujet qui occupe une bonne partie de mes journées de travail, Titan!
Donc concernant le projet de sous-marin dans les lacs, comme son nom l'indique, il n'en est qu'à l'état de projet et n'a aucun moyen d'être concrétisé dans un futur proche. Pour une telle mission, déjà il va falloir un développement monstrueux en amont pour l'amener à un stade "sélectionnable", c'est-à-dire suffisamment prometteur et fiable pour convaincre les décideurs de la NASA de la réussite du projet. On appelle ça le TRL (technology readiness level), et en gros tant qu'on n'est pas à TRL6, on n'a aucune chance d'être sélectionné pour vol. Ils ont l'air d'en être au TRL2.. Ensuite, pour un projet aussi complexe, qui plus est dans le système solaire externe, il faut un budget moyen à lourd. Moyen pour les US, ce sont les programmes New Frontiers (< 850 millions de dollars). Or, la dernière sélection dans le cadre d'un New Frontiers, ça a été Dragonfly, un drone à destination de.... Titan. Donc cette cible n'est plus au programme des prochaines sélections NF. Si on parle de plus gros budgets, ce sont les missions qu'on appelle flagship (2 à 3 milliards de $). C'est peu probable qu'on ait un flagship Titan étant donné, encore une fois, Dragonfly. Donc question sous-marin titanien, c'est un beau projet, mais pour l'instant pas réalisable. Et finalement, pas si intéressant scientifiquement - ce serait plutôt un challenge technologique, mais un challenge techno sans intérêt scientifique ne se justifie que faiblement vis-à-vis de la NASA.

Mais Titan aujourd'hui, c'est Dragonfly!! Et cocorico, il y a une contribution française (votre servitrice..). On va aller explorer une zone équatoriale composée de dunes, de cratères d'impact, potentiellement de cryovolcans. Avec un drone (un double quadcoptère) de 2.5 m d'envergure, plusieurs centaines de kg, qui sera capable de voler sur des distances de plusieurs dizaines de km horizontaux en un vol, plusieurs centaines de km sur toute la mission. Décollage de la Terre 2027, arrivée Titan au milieu des années 2030s. Un des quatre instruments embarqués sera capable de comprendre jusqu'à quel niveau de complexité la chimie a évolué dans un environnement riche en molécules organiques. Et en plus, cet environnement, cette atmosphère que possède Titan, tout cela ressemble fortement à ce qu'était la Terre primitive.. au moment où la vie y est apparue. Donc objectif bonus de la mission Dragonfly - pourrait-on trouver des formes de vie sur Titan?

Vive Titan!!
CARO

Salut Caro !

ET merci pour ces info de première main !

J'ignorais l'existence de ces projets titanesques mais les explications sont claires.
Donc pas de sous-marin pour Titan mais une libellule...

Je me réjouis d'en apprendre un peu plus sur les specs du drone mais surtout sur ses conditions de vol là-bas (tu as déjà un bulletin météo ?) et comment faire face au décalage temporel pour le pilotage de la bête ?

Ahh, mon Génie!!

Eh bien figure toi que oui, on a un bulletin météo. Un peu voulu, un peu par chance. Il se trouve que la sonde Huygens avait atterri sur Titan en 2004, à peu près à la même latitude que Dragonfly. Et Dragonfly atterrira en 2034, soit pile 30 ans après Huygens. Dit comme ça, ça ne veut pas dire grand chose. Mais lorsqu'on sait qu'une année sur Titan c'est 30 années terrestres, alors là ça prend tout son sens. En atterrissant à la même saison et la même latitude que son prédécesseur, Dragonfly sait à peu près la météo qu'il fera: des vents faibles, pas de pluie (d'hydrocarbures).

Quant au vol, le plus challenging est le premier. Lors de l'arrivée et la descente dans l'atmosphère de Titan, le drone sera toujours encapsulé dans son bouclier thermique. A une certaine altitude, il s'en détachera, déploiera ses hélices, commencera son vol autonome et choisira lui-même sa zone d'atterrissage. Bon, l'idée est quand même de l'envoyer dans une zone assez safe pour le landing - les interdunes équatoriales. A priori c'est assez plat sur plusieurs km, et pas trop d'obstacles. Mais bon, ça n'en restera pas moins un choix fait en temps réel par l'intelligence artificielle de bord, à partir des données des caméras (il y en a de tous les côtés et dessous). Pour les vols suivants, on fera ça en mode "leapfrog": décollage, repérage de la zone d'atterrissage suivante sans s'y poser, et retour à la case départ. Comme ça les équipes scientifiques auront le temps d'analyser les données pour déterminer une zone plus précise qui soit safe. Et lorsqu'il sera temps d'y aller, Dragonfly ira explorer, en vol, la zone n+2 avant de revenir atterrir à la zone n+1 qui a été analysée par l'humain, et ainsi de suite. Donc navigation autonome, mais on va l'aider. Et comme avec Curiosity qui roule sur Mars, l'IA apprendra au fur et à mesure et deviendra de plus en plus autonome au fil du temps.

Salut

Bon retour chez nous de notre astrophysicienne préférée, viens nous rendre visite plus souvent.

Titan sera à combien de minutes lumière (heure ?) lorsque Dragonfly se posera sur Titan ?

Vu la proximité de Saturne et sa dimension Il est étonnant que Titan puisse encore posséder une atmosphère dense (10* la terrestre à ce qu'il parait), ce qui permettra à Dragonfly de se déplacer facilement avec des hélices alors que les autres lunes n'en possèdent pas ou presque (déjà Mars, c'est assez ténu comme atmosphère).

Quel sera la mission principale de Dragonfly ?

Le Vieux

Salut Caro, content d'avoir de tes nouvelles
Tu tripatouilles toujours du laser martien ?

Avec Dragonfly on sera à 1h-1h30 de temps de communication, et en "direct-to-Earth", c'est-à-dire qu'on ne passe pas par un orbiteur intermédiaire. C'est possible parce qu'on sera à l'équateur, donc en visibilité constante de la Terre.
Et donc évidemment, tout sera automatisé. Même si finalement, grâce à l'atmosphère dense, l'atterrissage prendra 2h30 entre l'entrée dans l'atmosphère et la pose sur le sol. Tout ce processus on l'appelle l'EDL (entry-descent-landing). Sur Mars, vu l'atmosphère 100 fois plus ténue que sur Terre, c'était 7 minutes (les "7 minutes de terreur", si tu avais suivi l'atterrissage de Curiosity ou de Perseverance).

Pour l'atmosphère de Titan, c'est une super question, et on n'a pas la réponse. Il reste beaucoup de mystères. Comme tu dis elle est plus dense que celle de la Terre ("que" 4 fois plus dense) et ça rend le vol facile (de la même manière qu'il est plus facile de nager dans l'eau que de voler dans l'air). Elle est constituée principalement d'azote N2 à 95 % et de méthane/éthane à 5 %. En fait, Saturne, contrairement à ce qu'on pourrait penser, va aider Titan à garder cette atmosphère. Sur Terre, on a une magnétosphère qui protège l'atmosphère des vents solaires. Ces vents ont tendance à balayer les gaz, et donc les molécules des atmosphères planétaires. C'est à cause d'eux que Mars a perdu son atmosphère, Mars n'ayant plus de magnétosphère depuis un moment. Et Titan dans tout ça? Titan ben elle n'a pas de magnétosphère, mais elle est incluse dans la magnétosphère gigantesque de Saturne. Donc protégée des vents solaires. Ca ne suffit pas à expliquer cette densité d'atmosphère de Titan, parce que sinon tous les satellites de Saturne et de Jupiter auraient une atmosphère, et ça n'est pas le cas. On part sur une hypothèse d'une combinaison de facteurs: la protection par Saturne, donc, mais aussi un corps très froid qui limite les mouvements des particules et donc l'échappement des composants de l'atmosphère (on est à -180 °C en surface), un corps quand même gros, le 2ème plus gros satellite du système solaire, donc une bonne gravité pour garder les molécules près de sa surface. Et puis probablement des phénomènes d'enrichissements permanents, avec la présence d'ammoniac (NH3). Et enfin, un bon coup de bol
Pour l'atmosphère, il y a également la problématique du méthane. Normalement cette molécule est très vite détruite, de l'ordre de quelques années. Donc sa présence à 5 % dans l'atmosphère de Titan est énigmatique, et supposerait un réapprovisionnement constant. Mais d'où?

Dragonfly a plusieurs objectifs, mais un des principaux, et celui qui est directement lié à ce que je fais dessus, c'est de comprendre la chimie qui se produit dans l'atmosphère et à la surface de Titan. Titan aujourd'hui, c'est une Terre primitive. On est un peu comme sur Terre au moment où la vie y apparaissait, il y a 4 milliards d'années. Donc étudier Titan, c'est comme étudier la Terre qu'on aurait mis au congélateur sur des temps géologiques. Et c'est un pas de plus vers la compréhension des origines de la vie sur Terre. Concrètement, sur Dragonfly il y a 4 instruments; une série de caméras, DragonCam, pour la navigation et l'analyse visuelle. Un spectro gamma, DraGNS, pour analyser la composition humide du sol (eau, ammoniac). Une station météo ultra exhaustive, DraGMet, qui va de l'analyse sismique à l'étude des vents, de la permittivité du sol, des températures etc. Et un analyseur chimique, DraMS, qui va pouvoir identifier les molécules simples et complexes de l'atmosphère mais surtout du sol avec un système de forage et distribution de l'échantillon. On cherche à comprendre jusqu'à quel niveau de complexité la chimie a pu se développer dans un environnement riche en molécules organiques.

Le Vieux a écrit:

Salut

Bon retour chez nous de notre astrophysicienne préférée, viens nous rendre visite plus souvent.

Titan sera à combien de minutes lumière  (heure ?) lorsque Dragonfly se posera  sur Titan ?

Vu la proximité de Saturne et sa dimension Il est étonnant que Titan puisse encore posséder une atmosphère dense (10* la terrestre à ce qu'il parait), ce qui permettra à Dragonfly de se déplacer facilement avec des hélices alors que les autres lunes n'en possèdent pas ou presque (déjà Mars, c'est assez ténu comme atmosphère).

Quel sera la mission principale de Dragonfly ?

Le Vieux

Je tripatouille les martiens ouais

ji_louis a écrit:

Salut Caro, content d'avoir de tes nouvelles
Tu tripatouilles toujours du laser martien ?

Salut

Merci Caro pour tes précisions.

Ce qui m'intéresserait aussi de connaître, c'est comment est née Titan, était-ce un astre errant capté par Saturne ou est-il né en même temps que Saturne et est resté dans son environnement, ce qui me parait difficile, normalement Saturne aurait du soit la désintégrer, soit l'attirer à lui, Titan est tout de même fort proche de la planète géante (moins de 1,3 millions km) . Mais il en va de même des 61 autres satellites répertorié de Saturne
On en saura peut être plus avec l'analyse du sol de Titan.



Le Vieux

Ça fait plaisir d'avoir des nouvelles Caro ! Et en plus pile sur le bon sujet !